En contrepoint du cours sur le cinéma du Front populaire quelques mots sur le film de Marcel Carné dont la version rénovée sera présentée au Ciné Lumière de l'IFRU (Londres) du 21 au 25 octobre (et le 30 octobre).
Quelques mots sur Le
Jour se lève de Marcel Carné (1939)
Le Jour se lève (bande annonce officielle. Version restaurée).
Le film : Le Jour se lève s’inscrit dans une période où l’Europe sombre peu à
peu dans la violence, où la guerre menace, et où les illusions du Front
populaire se sont envolées.
Marcel Carné semble emprisonner dans son
film, le pessimisme de ses contemporains.
Le film sort en juin 1939, et peut même être
présenté à la Mostra de Venise, quelques semaines avant le début de la Seconde
Guerre mondiale. En 2014, il est présenté pour la première fois depuis 1939, dans sa
version intégrale restaurée. Il avait en effet été censuré par le gouvernement de
Vichy, dont la morale réprouvait la scène où Arletty est nue dans sa douche. Les copies diffusées après la guerre avaient conservé cette version censurée.
C’est l’un des films le plus emblématique du
« réalisme poétique » français. Si de cette période de l’œuvre de
Carné, on connaît mieux Hôtel du Nord
ou Quai des Brumes (1938), Le Jour se lève fait également partie
des chefs d’œuvre du cinéma français des années trente.
Le réalisateur : Refusant de devenir
ébéniste, comme son père, Marcel Carné se tourne d’abord vers la photographie,
puis s’oriente vers le cinéma (critique et assistant réalisateur de Jacques
Feyder de René Clair etc.). A la fin des années trente, il a réalisé 4 courts
métrages et 4 longs (le premier, Jenny,
datant de 1936).
Parmi l’équipe du film :
Le réalisme poétique tient beaucoup aux
décors d’Alexandre Trauner, artiste d’origine hongroise qui en 1928 a fui le
régime fascisant d’Horthy et avec qui Marcel Carné tourne depuis 1937 (Drôle de drame). C’est lui qui fait
construire un immeuble de 5 étages dans les studios de Boulogne Billancourt où
est tourné le film (de février à mai 1939). Carné, quant à lui, enferme encore
plus son héros (Jean Gabin), qui a trouvé refuge dans l’immeuble, en exigeant
que sa chambre ait 4 murs et non 3 (plans circulaires).
Et quand on parle de poésie, il faut
évidemment citer les dialogues et le scénario de Jacques Prévert, dont l’engagement
politique transparaît dans cette histoire ancrée dans un contexte ouvrier et marquée
par les inégalités sociales.
Enfin, le film ne serait pas ce qu’il est
sans la musique de Maurice Jaubert qui a aussi travaillé avec Jean Vigo, Jean
Renoir et qui travaille avec Carné depuis 1937. Tué au début de la Seconde Guerre mondiale, c’est sa dernière
œuvre, même si ses partitions seront utilisées par François Truffaut pour 4 de
ses longs métrages (Adèle H, la Chambre
verte, L’argent de poche, L’Homme qui aimait les femmes).
Les acteurs : Jean Gabin est alors la
grande star du cinéma français. En le voyant, on pense aux personnages joués par Marlon
Brando ou à celui de Van Heflin dans The
Prowler de Joseph Losey. Il figure l’idéal type du héros désabusé des films
du réalisme poétique, avec Arletty, son alter ego féminin. La gouaille
habituelle de l’actrice est cependant ici nuancée par de très lourds silences.
Plus on s'approche de la guerre, plus le réalisme poétique se fait dépressif.
Autres faits sur le film : Un remake
(The Long night) a été tourné en 1947 par Anatole Litvak, avec un happy end hollywoodien...
A la médiathèque de l'IFRU (Londres) :
Vous pouvez lire : Michel Pérez, Les films de Marcel Carné, Ramsay, 1994
Vous pouvez écouter : Maurice Jaubert, Les musiques de film de Marcel Carné (CD).
En ligne notamment :
- Un site sur Marcel Carné et une page sur le film avec une iconographie abondante :
http://www.marcel-carne.com/les-films-de-marcel-carne/1939-le-jour-se-leve/fiche-technique-synopsis-revue-de-presse/
- La page du ciné club de Caen sur le film :
http://www.cineclubdecaen.com/realisat/carne/jourseleve.htm
- la page du site critikat sur le film :
http://www.critikat.com/actualite-cine/critique/le-jour-se-leve.html
- la page du blog du Monde : l'Oeil sur l'écran :
http://films.blog.lemonde.fr/2007/01/24/jour-leve/
- les pages de la BIFI et de la cinémathèque consacrées à Carné où vous trouverez une bibliographie plus exhaustive :
http://cinema.encyclopedie.personnalites.bifi.fr/index.php?pk=12183
http://www.cinematheque.fr/fr/dans-salles/hommages-retrospectives/fiche-cycle/marcel-carn,477.html